« Ce poète, de la fin du XIIIème siècle et du commencement du XlVème, est auteur de ballades et de rondels qui se trouvent à la suite d'un manuscrit du roman de la Rose, par Jehan de Meung, dit Clopinel écrit 1332. »
On y compte 9 ballades et 9 rondels entremêlés. Ce poète sacrifie souvent au mauvais goût qui le porte à jouer sur la consonance des mêmes mots. Cette manie est particulièrement sensible dans sa première ballade que nous donnons ci dessous, non comme la meilleure pièce de l' auteur, mais comme un exemple du misérable genre qui n'a que trop souvent défiguré la poésie de nos anciens trouvères. Au reste, Jehan Acars est, dans maintes occasions, gracieux, courtois, agréable chanteur de l'amour honnête, et fort passionné pour le beau sexe.
Ses chants se ressentent beaucoup de l'époque où ils furent composés. Sa prise amoureuse fit, comme il le dit lui-même, au mois d'avril, et tout est printanier dans ses vers :
Si plaisamment m'avés pris
Et espris,
Mes dous cuers que li mieux prise
Qu'à vous me renc et compris,
Ai compris
En ceste amoureuse prise,
Es dous biens qu`amours m'envoie
D'estre en voie
Pour vostre amour desservir,
Flours du monde à vous servir.
Donc ne doi estre repris,
L'ai empris,
Voloir de si noble emprise,
Car jà pour venir apris
Seuc apris
Mon cuer de si douce aprise
Que se jà merci n'avoie,
Si savoie
Mon cuer, sans jà m'esservir
Flours du monde à vous servir.
Gens corps ou riens n'a mespris
Et pourpris,
Du toute honneurs est pourprise,
Ançois que mors m'ait souspris
N'entrepris ;
Par grace soiez esprise,
Que vo pitiés me pourvoie,
Et si voie
Moi à ma vie asservir
Flours du monde à vous servir.
Par si plaisant atraiance
M'a volu amours atraire.
Que ja ne m`en quier retraire,
Pris fu en douce semblance
Par si plaisant atraiance,
Que je preing en la plaisance
Voloir de dire et de faire,
Qu'il doie à tous amans plaire
Par si plaisant atraiance
En avril, en la saison gaie,
El temps que toute riens s'esgaie
Et tous cuers aléete suevre, etc.
"Le commencement de la seconde ballade est plein de charme et de douceur."
Dès ce que lui hors d'ignorance.
Et qui connu qu'estoit honnours
Emprienta vo douce semblance,
Dame, en mon cuer loial amours
Et je qui ne pensoie aillours
Liés à vous servir m'assenti,
Car cn sens et bonté aussi
Vi bien qu'estiés par droiture,
Flours de toute créature.
Pour ce dame plesans et franche
Ains que cheus soit en decours,
Mes cors par trop longue souffrance
Soit de moi pris aucuns boins tours,
Si qu'en pitié de vo secours
Voie mon cors povre enrichi
Et des maus dont tant ai laugui
Me prenes par vo grace en cure
Flours de toute créature.
Tant et douce nourreturo D'amours que son gré faisans....
Se plus fort d'antre ami aing
Et sui espris ardamment. . . .
Troisieme Rondel.
En vostre douce samblance
Dame, ou toutes biautés maint,
Mes cuers loyaument remaint
C'est li trésors de plaisance.
Pins cuers, doux, gente et gentieux
Exemplaires de biauté,
Gens cors amoureux soucieux,
Vo regars monstrant pitè.
Vo maintien, vo bele ordene,
Vo frescbe coulour sanguiue, etc.
Eureusement est pris
Dame, cils qui sans amer
Met sentence en bien amer,
Puisque de vous est épris
Eureusement est puis.
Dous cuers je ne puis sous vous
Durer si me doinst dix joie. . . .
Cinquième Rondel.
Tant est vos gens cors jolis. . . .
Bele et boinne entièrement,
Trésors de joie et d'amour,
Or ne puis-je longuement
Fuir contre notre amour
Si me rent pris et vaincus
En vo dons commandement, etc.
Tant preut amours plaisamment, etc.
Fins cuers docs quant paieront
Vostre oel ce qu'il mont prarnis,
Se fax entendre me font,
Mors sui je n'ai plus d'amis,
Et se par eus sui trahis,
Per promuesse en atraiant,
Je ne sai mais ou amant
Se tendent pris.
En vostre douce figure
Dame est escondis muciés,
C'est decevans couverture
Ou amis est inginiés,
S'en votre douce figure
Dame est escondis muciés
Vos dous semblans asseuré,
Et se puis se déchasiés,
N'est ce traïsons obscure
S'en votre douce figure, etc.
Nou cuer qu'a doute combat . . . .
Se je vif en gaie enfance,
Et me tieng lie en chantant ,
J'ai droit, quant j'en preng sustance
En un gracieus samblant,
Gay, deboinaire et riant
Qui au souvenir
Fut ma pensée esjoir
En espérant.
Neuvième Rondel.
Pour vous por amours sui pris et dechasiés. . . .
Gens cors en biauté parfait
Et parfais sur toutes dames parfaittes,
Or sui je pris et atrais, etc.